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Le Sénégal est un pays plein de ressources naturelles, néanmoins les jeunes continuent de s’adonner à l’émigration clandestine, quelle est votre impression ? Effectivement, le Sénégal est un pays riche avec beaucoup de ressources naturelles et de potentialités humaines, stratégiques, politiques et culturelles. Cependant, si un tel phénomène de « Barça ou barsakh » prend une telle envergure, on doit s’interroger sur beaucoup de choses. Evidemment, je ne cautionne jamais ce phénomène mais si on analyse en profondeur la pensée des candidats à l’émigration clandestine, on s’aperçoit qu’ils n’ont pas d’espoir à rester au pays et vivre la situation comme s’ils n’existaient pas et qu’ils n’ont rien à perdre en empruntant cette aventure « suicidaire ». Cependant, des solutions peuvent être trouvées. D’abord, il appartient aux pouvoirs publics de revoir leurs politiques portant sur l’éducation, l’enseignement, la formation professionnelle et l’entrepreneuriat qui présentent déjà d’innombrables maux. A cela s’ajoute la volonté des jeunes à se démarquer des prétentions trop ambitieuses en voulant s’enrichir à tout prix. Il paraît que chaque candidat paye vers les 300 à 400 000 FCFA pour le billet du voyage alors que beaucoup d’entrepreneurs en Afrique ont démarré et réussi avec moins que cela donc on peut penser à cette option. Les jeunes sénégalais semblent préférer aller à l’étranger que de rester sur le territoire national, pourquoi ce choix, selon-vous ? Oui quand on considère qu’on vit la misère, le métier exercé ne permet pas de faire face aux charges et qu’on voit ceux qui ont déjà tenté réussir, le tout corroboré par le poids de la pression sociale, l’émigration à tout prix demeure la seule solution pour une jeunesse désemparée et désœuvrée. Et malheureusement c’est ce qui est arrivé à la jeunesse sénégalaise. Alors, il est temps que beaucoup de choses changent si nous voulons renverser la tendance. Les mentalités doivent changer chez les citoyens mais aussi chez les dirigeants… Oui, mais on a constaté également qu’aujourd’hui beaucoup d’entreprises créées au Sénégal meurent dès la première ou la deuxième année, qu’est-ce qui peut expliquer cette mortalité précoce ? La moralité précoce et à grande échelle est un phénomène très fréquent au Sénégal et devenu à la longue banale. Les difficultés sont partout. On peut noter des gens qui veulent entreprendre sans un minimum de prérequis en capacités et compétences entrepreneuriales, des moyens financiers absents, un environnement des affaires peu propice, une fiscalité inappropriée surtout avec les PME, une concurrence déloyale des entreprises étrangères, un échec des politiques publiques … tous ces facteurs expliquent que nous avons un écosystème entrepreneurial « malade » qui pousse les entreprises plus à la mortalité qu’à la survie. Quel est votre avis sur l’accompagnement entrepreneurial au Sénégal ? Il importe de noter de prime abord que l’accompagnement entrepreneurial est un ensemble de pratiques et de services destinés aux entrepreneurs et aux entreprises pour assurer leur démarrage et leur développement. Nous en avons des dizaines au Sénégal avec des domaines d’activité, des missions et des cibles diversifiés. Cette grande diversité témoigne l’existence de gros efforts de l’Etat et de ses partenaires. Cependant, vu la situation, on peut dire l’accompagnement entrepreneurial n’est pas encore en adéquation avec les attentes des parties prenantes. Il n’échappe pas aux difficultés de l’écosystème. Les objectifs sont loin d’être atteints. Pour pallier ce problème, les acteurs doivent repenser le modèle de l’accompagnement avec une reconfiguration des ressources humaines, des programmes, de l’allocation des ressources financières pour mieux accompagner l’entrepreneuriat. Novembre 2020-Biramawa Magazine-Page 35

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