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cette volonté de prendre le temps ? Chaque adulte doit savoir qu’il a un impact sur l’enfant, et doit se sentir responsable de ce qu’il transmet comme message. Ce « temps à prendre » est un incontournable et ce sujet soulève bien des inquiétudes. Il est important, nécessaire, de laisser les enfants prendre le temps ; on attend souvent des résultats rapides, alors que tragiquement, à cause de cela, on met nos enfants en position d’échec. Déjà le parent n’a pas souvent l’occasion ou la capacité de prendre le temps. Notre société impose la vitesse, on inscrit les enfants à un nombre incalculable de cours et d’activités. Ils sont bousculés, n’ont plus le temps de faire leurs propres découvertes par le jeu. Investir en prévention constitue également un bel exemple de respect du temps : investir dans des projets, dans l’accompagnement ; est-ce réaliste de consacrer davantage de temps aux enfants, aujourd’hui ? on dit qu’un dollar investi sauve 5 $ en éventuelles interventions, mais est-ce un calcul que les fonctionnaires peuvent faire ? Quand on mène ce genre d’études, on regarde les gains éventuels, en diminution de l’utilisation aux services de santé, diminution du taux de décrochage et d’absentéisme des parents, etc. Il est clair qu’actuellement on sous-estime la réalité, investir à long terme est rentable au plan économique autant qu’au plan sociétal. les programmes actuels accompagnent les parents dans leur démarche, agissent sur l’environnement grâce à la coordination de ressources locales. Ces programmes sont efficaces à court terme pour le développement de l’enfant, et à long terme, sur la santé du jeune adulte que sera l’enfant. Il faut donc réunir les conditions qui permettront la création et le développement de politiques favorables à l’enfance. Toutes les activités mises en place auprès et autour des enfants et des parents sont essentielles, mais ne sont valables que si la société est d’accord. Actuellement, dans notre société, on n’a malheureusement pas l’impression que ces orientations sont les bienvenues, les décisions politiques n’y sont pas. Les mots pour le dire on n’a pas beaucoup de mots en français pour bien décrire la relation entre l’éducatrice et l’enfant : le plaisir, l’amour professionnel, l’attachement, l’intérêt en sont tous, un peu. la question du toucher doit également être réfléchie, mais avec prudence, finesse et sans précipitation, car elle reste très délicate. D’abord, pour structurer un enfant, on ne doit pas REGARDS CROISÉS sur la petite enfance toucher le corps pour l’exciter ou pour le détruire. Myriam David avait repris la question du toucher dans l’une des dernières entrevues accordées ; ce toucher est un toucher « pour être ensemble », marque d’un infini respect de la juste distance qu’il doit y avoir entre une professionnelle et un enfant. Il est toutefois intéressant de souligner que l’agressivité physique se transmet aussi par le toucher, et que la façon de toucher joue donc un rôle prépondérant dans toute cette réflexion. Et la télévision ? Étrangement, il y a de moins en moins d’enfants, mais on a toujours moins de temps ! en outre, on ne peut pas passer sous silence le lien qui se crée entre la question du temps et la technologie. les recherches se rejoignent dans ces domaines ; on passe de l’acte à la pensée par un processus complexe. la vie psychique ne peut se développer qu’à partir d’un manque ; pourtant, par réflexe, crainte ou peurs multiples, on s’assure pour combler les manques de bombarder les enfants et même les toutpetits avec des stimuli sensoriels sans limites : la télévision. elle occupe toute la place et actuellement, même les bébés sont placés devant la télévision pendant des heures. les cliniciens constatent une augmentation du nombre d’enfants dits hyperactifs, et une augmentation des enfants qui ont d’étranges troubles de la modulation sensorielle. sans être des autistes, ils éprouvent des difficultés à associer et à donner un sens aux stimulations sensorielles dont on les bombarde. Il faut impérativement renverser la vapeur et faire comprendre que le manque et le silence sont aussi nécessaires au développement. Comment y parvenir ? en créant des espaces qui permettent le jeu et qui ouvrent à la culture. 25

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