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SYMPOSIUM familiales. Plutôt que de développer de l’empathie, bien des préjugés apparaissent et, devons-nous le répéter, ils sont très dommageables. Même si elles sont très souvent masquées par la lourdeur du quotidien, les compétences des parents doivent être respectées. Une professionnelle qui n’entretient pas de bons liens avec le parent ne pourra pas entretenir de bons liens avec l’enfant, puisqu’elle verra toujours le mauvais parent à travers l’enfant. et pourtant, l’enfant doit se sentir à l’aise, il doit profiter de sa rencontre avec une nouvelle personne, il doit développer une amitié avec l’éducatrice. le lien est important pour l’enfant ; il doit être vu, il doit avoir le sentiment d’être accepté. C’est un art que de s’occuper des enfants des autres dans l’amour professionnel et le plaisir. Tout en restant dans le cadre professionnel, la relation doit être chaleureuse. Moment intime et chaleureux, la relation est tout aussi importante pour l’adulte, pour l’éducatrice. Pour y arriver, le milieu de travail doit fournir toute l’aide nécessaire, afin que puisse être atteinte la qualité de soin souhaitée : le soutien, l’accompagnement sont des enjeux pour l’adulte et la formation devient alors un élément essentiel pour y parvenir. elle permet aux intervenants d’apprendre à décoder les comportements et à accompagner les familles. l’aide de l’équipe est aussi essentielle. Face aux familles démunies, la tendance est soit de baisser les bras soit de faire toujours plus, avec un risque réel de craquer. le rôle de l’équipe permet de s’entraider, de s’aider, de se soutenir. Ce sont des ingrédients qui peuvent être bien intégrés dans les organisations. Toutefois, ils ne permettent pas d’atteindre les objectifs visés s’il n’y a pas, en plus, le plaisir et l’amour. sans amour, on ne peut pas être avec les enfants. Il est possible que l’éducatrice se sente débordée, mais elle doit vouloir rester avec les enfants. si elle perd le plaisir, si la joie profonde d’être avec les enfants disparaît, même si tous ses gestes sont maîtrisés, si elle est polie, même si elle travaille comme avant, les enfants le sentiront immédiatement et ne seront pas bien ; les enfants sentent ces choses bien plus tôt que les adultes. Devant le travail de l’éducatrice, les parents sont quelquefois découragés. Mais le parent ne doit pas imiter l’éducatrice, et vice versa. le lieu d’accueil permet de proposer une tranquillité, presque thérapeutique, mais il n’est pas réaliste de demander la même chose aux familles ; la vie de famille est beaucoup plus complexe que la vie en institution. Il ne faut pas attendre des parents qu’ils suivent la façon de faire de l’établissement. Il est possible qu’elle adopte quelques gestes, mis on ne doit pas mêler les deux fonctions : 24 « la mère doit être assez bonne, c’est déjà beaucoup. Mais pour la professionnelle, c’est mieux d’être parfaite. » - Anna Tardos L’être humain se construit dans la complexité les quelques décennies qui ont suivi la seconde Guerre mondiale ont vu s’accomplir plus de progrès en matière de pédiatrie qu’en ont vu tous les millénaires qui l’ont précédée. on en sait beaucoup plus qu’avant ; le travail des pédiatres qui permet aux enfants de mieux naître, physiquement, a fait un bond immense. Mais, nous avons encore beaucoup à faire pour les faire mieux naître psychiquement. Pour y parvenir et mettre en œuvre nos connaissances, de nombreux obstacles nous gênent : des obstacles politiques, économiques ou idéologiques, et même des obstacles intérieurs. en effet, par moment, l’enfant nous entraîne dans des sentiments ambivalents, car oui, quelquefois, l’enfant nous irrite. Il faut accepter ces sentiments contradictoires, tout en sachant vers quoi il nous entraîne. Il ne s’agit pas ici d’aimer et de ne pas aimer en alternance; il s’agit de ne pas aimer et d’aimer en même temps. Aux prises avec cette ambivalence, ce tiraillement de deux mouvements contradictoires, il n’est pas rare que les parents puissent se sentir coupables. la plus grande ambivalence toutefois est portée dans deux phrases qui ont chacune leur valeur propre : « l’enfant ne peut attendre, son nom est aujourd’hui » - Gabriela Mistral « le temps méprise ce que l’on fait sans lui » - Paul Morand les deux sont vraies, tout en étant contradictoires ; il faut savoir moduler le temps et l’adapter au rythme de la vie. les professionnels doivent modeler le suivi des enfants dans la durée, en s’assurant que les bilans aient des intervalles suffisants entre eux pour permettre les changements, mais ils ne doivent pas trop attendre, car l’enfant quelquefois a besoin d’interventions urgentes. Il existe d’ailleurs un déséquilibre flagrant entre le développement technologique et le développement spirituel : la technologie exige toujours une plus grande rapidité, alors qu’on doit prendre le temps d’écouter les enfants. Il n’est pas plus long de regarder les enfants et de les écouter nous parler, mais on accorde ainsi une réelle importance à l’enfant. l’adulte ne doit-il pas lui donner l’exemple pour qu’il puisse reproduire ACTES DU SYMPOSIUM ET COLLOQUE INTERNATIONAL 2012

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