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SYMPOSIUM 01 REGARDS CROISÉS SUR LA PETITE ENFANCE les victoires progressives sur l’infertilité des couples et les avancées considérables de l’Assistance Médicale à la ProcréaL’ENFANT EN 2012 Bernard Golse Pédopsychiatre et psychanalyste • France on sait que l’accueil de l’enfant par ses parents dépend en grande partie des représentations mentales que ceux-ci se sont forgées à son sujet. Ces représentations mentales que Michel soulé appelait « les bébés-dans-la-tête » constituent l’enfant dit « imaginaire » dont on décrit habituellement en quatre composantes principales : l’enfant fantasmatique (groupe de représentations inconscientes propres à chacun des deux parents), l’enfant rêvé par le couple (groupe de représentations conscientes et préconscientes), l’enfant narcissique (Freud) et l’enfant dit mythique ou culturel, enfin (lebovici). C’est cet enfant mythique ou culturel qui nous permet le mieux de réfléchir à la question de l’enfant aujourd’hui. tion n’ont fait que renforcer ces différents courants d’évolution qui sous-tendent le mythe de l’enfant parfait. Mais, dans le même temps, l’enfant se doit d’être le plus rapidement possible autonome, c’est-à-dire le moins longtemps bébé afin de ne pas trop interférer avec le travail des parents qui est souvent prioritaire avant la naissance de l’enfant et qui doit ensuite être rapidement repris. le trait est sans doute un peu forcé, mais il comporte cependant sa part de vérité. on notera, par exemple, que les prétendus progrès de la puériculture vont souvent dans le sens d’un éloignement progressif, mais rapide, du corps du bébé et de celui de l’adulte (évoquons ici ces petits transats en tissu éponge qui permettent de donner le bain aux bébés sans risque de glissade ou de... noyade !). Comme s’il fallait qu’assez vite, le bébé dispose de son propre espace corporel et comportemental distinct de celui de ses parents. sociologiquement au moins, la fusion n’est plus dans l’air du temps, mais ceci nous amènera peut-être à rappeler que parmi les droits de l’enfant il y a, tout simplement, le droit à l’enfance ! De ce fait, il est l’objet d’un triple risque : - celui d’être attendu par des adultes dont les représentations mentales le concernant sont devenues trop rigides et trop figées, et qui ne sont donc pas suffisamment prêts à l’imprévu dont le nouveau-né est toujours porteur ; Chaque époque, chaque société, chaque groupe culturel élabore, en effet, ses représentations spécifiques de l’enfance et celles-ci imprègnent, qu’on le veuille ou non et qu’on le sache ou non, le fonctionnement psychique des adultes qui composent ces groupes, à savoir les parents ou les futurs parents. Dans notre société, par exemple, l’enfant est devenu de plus en plus précieux (parce que de plus en plus rare compte tenu de la diminution progressive de la taille des fratries), de plus en plus tardif (l’âge des mères à la première grossesse a régulièrement augmenté jusqu’à récemment) et il se doit également d’être de plus en plus parfait (au fur et à mesure des progrès des techniques biomédicales pré- et périnatales). 10 - celui de ne pas avoir le temps suffisant d’être un bébé du fait des exigences qu’on lui impose d’être trop vite autonome ; - celui, enfin, d’être considéré comme la dernière des utopies des adultes, mandat à l’évidence trop lourd à porter pour lui, et qui ne peut donc être source que de déceptions. Derrière cette évolution générale des représentations des adultes à l’égard de l’enfant et de l’enfance, l’ambivalence foncière des adultes est, en réalité, une ambivalence qui repose sur un équilibre difficile entre les représentations de l’enfant que nous aurions aimé être, et celles de l’enfant que ACTES DU SYMPOSIUM ET COLLOQUE INTERNATIONAL 2012

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